Nathalie Elimas, secrétaire d’état chargée de l’éducation prioritaire pour le MENJS, était en Vienne ce jeudi 17 décembre. Elle a notamment visité l’école de Poitiers Tony Laîné maternelle et le collège de Poitiers Ronsard.
C’est elle qui a annoncé le 22 novembre le début de la réforme de l’éducation prioritaire, en lançant une expérimentation sur 3 académies pour 2021/22 pour une possible réforme à la rentrée 2022. “ « Nous souhaitons sortir de cette logique de zonage pour donner des moyens aux établissements en fonction de leur projet » a-t-elle annoncé. En clair; elle souhaite la suppression de l’appellation REP et donner les moyens alloués à plus d’écoles et établissements, y compris du privé, choisis par le rectorat, en mettant en contrepartie un contrat d’objectifs de 3 ans individualisé pour chaque structure.

Ces annonces amènent beaucoup de questions et laissent apparaître des menaces sur la politique d’éducation prioritaire selon la FSU. La FSU 86 a donc profité de sa venue pour demander une audience avec elle. Nous n’avons pas été reçu par elle mais par son chef de cabinet, Mathieu Blugeon ( ex chef de cabinet du rectorat de Poitiers, ex IA-Dasen du Gers) et par Thierry Claverie ( IA-Dasen de la Vienne) de 14h à 14h45.

 

 

Projet de réforme éducation prioritaire : quel impact sur les élèves et les personnels REP/REP+ en termes d’encadrement, de projet ou d’indemnités ?

La FSU 86 a fait remonter les craintes des personnels actuellement en REP concernant les annonces de la fin du label, que cela soit pour les élèves (perte de dispositifs classes dédoublées, projet de réseau …) ou pour les personnels ( indemnitaire, bonification pour les promotions ou les permutations …).
Le chef de cabinet s’est voulu rassurant en indiquant que l’objectif de la réforme n’était pas qu’il y ait moins de personnes qui en bénéficie mais au contraire c’est pour qu’il y ait plus. Dans ce nouveau dispositif, en complément des REP et non à la place, il a cité les écoles orphelines proches des secteurs REP/REP+, des secteurs ruraux (il a cité Monts s/ Guesnes) ou des lycées professionnels qui pourraient bénéficier de la réforme et permettre de gommer les inégalités actuelles du non classement en REP. Il a indiqué que cette réforme pourrait donner des moyens pour rendre attractifs certains sites. Il a indiqué que les écoles et établissements auront au lieu d’une appellation, un contrat local d’accompagnement (CLA) de 3 ans avec des objectifs. Il indique que comme cela, les établissements qui seront dans le cadre d’un CLA, pourront bénéficier de moyens supplémentaires et progressifs (il a cité classes à effectif allégé et dispositifs innovants). Il indique que ce CLA pourra débloquer chez les personnels des indemnités (il a parlé d’IMP et aussi pour le 1er degré) ou de mesures RH en terme de mobilité ou d’avancement. Il a indiqué que cela n’allait pas être du “saupoudrage” de moyens car il indique que le budget prévu était sur les réserves nationales et donc donné après les budgets pédagogiques. Il évoque plus d’une centaine de postes mis en réserve dans le cadre de la réforme. Il a rappelé que la rentrée 2021, 3 académies étaient en expérimentation : Aix-Marseille, Lille et Nantes. En fonction du bilan effectué, cela donnera selon lui pour la rentrée 2022 soit une prolongation de l’expérimentation à d’autres académies, soit une mise en place nationale, soit un retrait du projet. Enfin, il a indiqué qu’en 2023, la refonte des quartiers prioritaires de la ville allait être effectuée et donc le but de la réforme était aussi de coïncider avec.
Pour la FSU, ce discours n’atténue pas les doutes et inquiétudes. Si l’attribution progressive de moyens peut être un levier pour atténuer les effets de seuil, il n’est alors pas alors logique de le faire qu’avec les moyens REP qui seraient élargis à plusieurs autres écoles/établissements en difficulté, mais il faudrait regarder l’ensemble avec aussi les moyens REP+ et les moyens donnés aux écoles avec un public dit “favorisé”. La FSU a rappelé qu’il n’est pas utile de détruire une appellation pour donner des moyens à ceux qui n’y sont pas. En Vienne, l’IA fait sa carte scolaire 1er degré sans seuil pour certaines écoles en regardant l’état des difficultés et non la présence d’une appellation. La vraie problématique ce sont les moyens et ils sont déjà actuellement insuffisants même en REP+ et en REP. Donc sans une augmentation de budget concrète et pérenne, tant en termes de postes que de moyens financiers, tout projet de réforme pour l’amélioration des conditions des élèves et des personnels sera bancal.

Les syndicats de la FSU 86 (SNUipp-FSU, SNES-FSU, SNEP-FSU), organisent un stage syndical le 14 janvier à destination de tou-tes les collègues, syndiqué-es ou non, en éducation prioritaire ou non. Cela sera un temps d’information, d’échange, de débat et de revendication pour construire la réponse aux menaces sur l’éducation prioritaire.
Retrouvez le 4 pages : Stage Éducation prioritaire 86 le jeudi 14 janvier – SNUipp-FSU 86 (snuipp86.fr)

Cité éducative : la Vienne aura-t-elle un projet ?

Mesure-phare du rapport Borloo sur la politique de la Ville, les « cités éducatives » visent à intensifier la prise en charge scolaire et périscolaire dans certains quartiers défavorisés (des enfants à partir de 3 ans et des jeunes jusqu’à 25 ans). L’implantation d’une cité éducative s’accompagne du versement d’un fond spécifique de 30 000 euros à chaque collège tête de réseau. A cela, peut s’ajouter une part variable selon les projets. Le ministère promet un total de 100 millions d’euros pour les trois prochaines années.Le pilotage local est assuré par le ou la principale du collège (dont l’indemnité reçue n’a pas été rendue publique) qui se doit de faire le lien entre des interlocuteurs divers (professeurs, parents, puéricultrices, travailleurs sociaux, animateurs sportifs, médecins…) et des institutions publiques (CAF, conseil départemental, mairie).

L’IA a indiqué que la Vienne avait fait remonter des projets au ministère (la date limite était le 16 décembre). Le chef de cabinet a indiqué que la décision serait connue en février/mars. A la question des critères de choix qui sera effectuée, le chef de cabinet indique que c’était la mise en valeur des projets plus que le cahier des charges qui allait compter car il faut de la cohésion et de la communication entre l’établissement et son environnement avec des liens déjà établis pour que le projet marche. Il a confirmé que l’appellation REP+ et cité éducative allaient dans une démarche de fusion car le but était pour ces territoires “en haute valeur éducative”, que l ‘élève ait accès à des aides éducatives du matin au coucher, en passant par les vacances.

La FSU est actuellement en observation et analyse des cités éducatives déjà ouvertes. En effet, en plus d’introduire un nouveau type de classement, elles peuvent devenir des lieux de déréglementation au détriment des statuts des personnels qui y travaillent et renforcent le risque d’ingérence des élu-es locales-aux dans les projets pédagogiques des équipes. Par ailleurs, faute de pouvoir agir sur certains leviers (emplois, transports, logements), les cités éducatives pourraient se résumer à des opérations vitrines sans réel effet ni sur la vie des citoyens, ni sur les apprentissages des élèves.

Collège Jules Verne Buxerolles : quelles réponses aux problématiques actuelles

La délégation s’appuie sur l’exemple du collège Jules Verne de Buxerolles, actuellement en situation de rupture, pour lancer un nouveau signal d’alerte sur cette situation et poser les questions suivantes.
Si le système des CLA vient remplacer le classement REP, quelle garantie peut-on obtenir sur la continuité :

  • des projets pédagogiques menés dans le cadre du REP
  • des projets personnels pour les enseignants et AED en termes de choix de carrière, mobilité, visibilité sur l’avenir, attractivité ?
  • Quelle garantie peut-on obtenir sur la stabilisation des équipes éducatives et des équipes de direction ?

M. Blugeon explique que les CLA permettront justement de rééquilibrer les pistes d’attractivité du collège et des écoles du réseau, qu’ils ne mettent pas plus en danger le suivi des projets pédagogiques que le système antérieur (refontes des attributions de l’étiquette REP ou QPV régulières). Il ajoute que le cas Jules Verne reste suivi et accompagné, ce à quoi renchérit M. Claverie, IA-DASEN : un projet d’accompagnement sera justement proposé en fin d’après-midi à l’ensemble des personnels.

Décharges de direction en éducation prioritaire, des évolutions sont-elles prévues ?

La délégation a fait part de la situation des directeurs-trices d’école en REP/REP+ qui n’ont pas un volume de décharge suffisant pour faire face aux contraintes liées à ces postes. Par exemple, les maternelles de Poitiers Daudet et Poitiers Andersen ou les primaires de Châtellerault Lagrange et Carème ne bénéficient que d’¼ de décharge, ce qui les met grandement en difficulté pour faire face au quotidien de la charge d’une école en éducation prioritaire et faire vivre le projet de réseau avec les réunions qui en découlent. Les nouvelles annonces sur la direction d’école (lien) n’évoquent en rien des solutions, et au contraire, peuvent permettre la remise en cause des décharges supplémentaires allouées à d’autres (Poitiers Laîné mat et Brel mat, Poitiers Brel élém) car rien ne les protège.
Le chef de cabinet a indiqué qu’il comprenait cette problématique et qu’il faisait remonter ce sujet au ministère.

pour la FSU 86, L. Courcier, M. Menaut, M. Thibault